Monstre. La voix de ta soeur résonne dans ton esprit et se répercute contre ce dernier si brutalement que tu en viens à te demander si tout cela est bien réel ou non. La fleur que tu viens de faire tourner au dessus de ta main tombe mollement à sa surface. Tu t'en moques, tout ce qui te préoccupe à cet instant, c'est la douleur vibrante que tu ressens à l'intérieur de toi. Irrévocable. Implacable. Insoutenable. Figée, tu fixes ta soeur et son expression te fait trembler au sens littéral du terme. Elle est tout simplement révulsée à ta vue. Ta propre soeur. Tu ne trouves même pas les mots pour lui répondre, tenter de lui faire comprendre et qu'elle t'aime toujours comme avant. C'est peine perdue, mais tu veux essayer. « Pétunia. S'il te plaît, Tunie ! Ne t'en vas pas ! Tunie ! » Mais c'est peine perdue, et tes appels se transforment en sanglotements incompréhensibles tandis que tu sembles voir ta soeur partir en courant en appelant votre mère. Baissant les yeux au sol, humides de larmes, tu n'entends plus que tes pleurs. Tu te sens si oppressée que tu as l'impression que tu n'arriverais plus jamais à avaler une bouffée d'air. C'est sûrement ça qu'il se passe quand quelqu'un vous déçoit ou vous blesse tellement qu'il n'y a pas de retour possible après tout. Mais tu es encore trop jeune pour vivre ça, surtout venant de ta propre soeur. Les bras serrés contre ta poitrine, tu essaies tant bien que mal de retenir tes sanglots, qui font si mal. Perdue, tu ne remarques même pas ce garçon à la mine compatissante et dégoûtée, qui s'approche de toi jusqu'à te faire face. « Ne pleure pas pour elle. Tu es bien plus intelligente et douée qu'elle, et elle le sait. » commence-t-il alors, te sortant de ta quasi-torpeur. Sur le moment, tu ne comprends pas pourquoi il dit ça, mais cela suffit à arrêter tes pleurs. Méfiante et intriguée, tu passes une main sur tes joues mouillées et le dévisages sans gêne quelconque. Tu le reconnais. C'est le garçon que ta soeur trouve bizarre et qui d'après elle, n'arrête pas de vous tourner autour. Les sourcils froncés, tu ne sais pas quelle attitude adopter. C'est finalement ce dernier qui rompt le silence en te tendant sa main. « Je suis Severus Rogue. Et moi aussi je sais faire ça. » déclare-t-il en s'emparant d'une marguerite et en la faisant tourner comme toi dix bonnes minutes avant lui. Les yeux écarquillés, une vague de joie s'empare soudainement de toi, heureuse de savoir que tu n'es pas la seule à savoir faire ce genre de choses. Tu n'es pas une monstre, ou du moins pas le seul à exister. « Lily Evans. » réponds-tu avec entrain.  


Assise dans l'herbe aux côtés de Severus, tu attends qu'il te dise ce que tu es. Légèrement impatiente, tu fronces le nez quand la déclaration de Severus se fait entendre, sonnant presque comme une insulte. Une sorcière. L'image que tu te fais tout de suite est sortie des livres pour enfants, représentant une vieille femme ridée, moche et ayant une attirance particulière pour le mal qu'elle peut procurer chez les enfants la plupart du temps. Remarquant ton expression, le garçon essaie de se rattraper, mais tu as déjà du mal à le croire. « Ce n'est pas du tout ce que tu imagines, Lily ! Dans le monde magique, on est envoyé dès onze ans dans une école de magie réputée où on y reste pendant sept ans. Et tout est absolument extraordinaire. » Dubitative, tu le fixes sans savoir quoi répondre. Tu n'es pas réellement convaincue qu'un tel monde existe. Pourtant, tout ce que tu sais faire aurait une explication plus ou moins sensée. Voyant que tu n'es pas tout à fait conquise par ce qu'il vient de dire, le garçon continue, les yeux au loin. « On raconte que l'un des meilleurs moments, c'est quand on t’attribue ta baguette magique. J'ai vraiment hâte d'y être. » Ignorant un instant ta conscience et la réalité imposante du monde qui t'entoure, tu te rapproches de Severus, un lueur dans les yeux. « Une baguette magique ? On s'en sert là-bas ?! » t'écries-tu alors, te moquant de savoir si on t'entend à des kilomètres à la ronde. « Oui, pour jeter des sorts. Et on peu même avoir un animal comme une chouette ou un hibou, un chat, un rat .. » Tu ne peux pas t'empêcher de le couper à nouveau, si excitée que tu pourrais courir dans tous le sens. « Et comment on sait qu'on est un sorcier ? Comment on sait qu'on va aller dans cette école ? » Apparemment satisfait que tu le crois enfin, un sourire s'étire pour la première fois sur le visage de Severus. « Tu sais déjà que tu es une sorcière. Je t'ai vu, tu sais. Tu devrais recevoir une lettre très prochainement. » Si l'euphorie est l'une des seules émotions présentes en toi depuis au moins cinq minutes, les mises en garde de Pétunia concernant un garçon inquiétant qui rodait autour de vous te reviennent en mémoire aussi vite. Ne sachant pas trop quoi en penser, tu réussis à comprendre que si il traînait près de vous, c'est parce qu'il savait que tu étais une "sorcière" et que cela devait représenter beaucoup à ses yeux pour qu'il agisse ainsi. Réalisant que la journée touchait bientôt à sa fin et que Pétunia devait avoir été se plaindre à vos parents, tu te lèves soudainement, créant un sentiment de panique chez Severus. « Hé, attends, où vas-tu ? » Te retournait subitement, tu lui adresses un sourire en coin. « Je retourne chez moi le raconter à mes parents. Puis je dois aussi parler à Pétunia. » commence-tu, de plus en plus inquiète devant la mine défaite de Severus. « Mais on se voit demain. J'ai encore beaucoup de questions à te poser ! »


« Lily ! Descends ma chérie, tu as du courrier. » Curieuse de savoir qui t'avais écris, l'éventualité selon laquelle cela pouvait être la lettre de Poudlard était quelque chose à laquelle tu ne pensais pas vraiment, déçue de ne pas l'avoir vu se produire plus tôt. Tes parents, eux, prenaient cette sorte de lubie comme une simple excentricité de ta part, ce qui convenait parfaitement à Pétunia jusque là. Une fois au rez-de-chaussée, tu ne peux étouffer l'espoir vibrant qui t'envahis quand tu te saisis de la lettre. Le cachet t'es étranger, et au fond de toi, tu sais que Severus a toujours eu raison et qu'il ne te mentait pas. L'ouvrant délicatement, comme si il s'agissait d'un objet des plus précieux, tu la dévores des yeux tandis qu'un sentiment de triomphe s'empare de toi. « MAMAN, PAPA ! Je vous l'avais bien dis ! Je suis une sorcière et je suis acceptée à Poudlard ! » Alertés par tes cris, les trois autres membres de la famille Evans sont bientôt là, t'entourant. Tes parents écarquillaient les yeux au fur et à mesure qu'ils parcouraient la lettre, tandis que Pétunia restait en arrière, toujours avec cet air dégoûté. « Mais.. C'est impossible. Richard ! » déclare enfin ta mère, plus surprise qu'autre chose. Mais ton père n'a pas non plus l'air de réaliser ce que cette lettre implique. Ce n'est que quasiment au bout d'une demi-heure que ta mère t'enlace dans ses bras, semblant accepter cette différence chez toi. « C'est fantastique, Lily ! Nous irons donc chercher tes affaires à .. Mais si tu sais, cet endroit. Puis nous t’emmèneront à la gare, qui a un drôle de nom d'ailleurs. » Tout sourire, tu es à des lieux de ce qu'il se passe juste sous ton nez. Ce n'est que quand tu perçois la désapprobation de ton père puis de ta mère que tu sors de ta bulle. Pétunia qui était en larmes tout en te fixant d'un air qui ne saillait pas à ses traits. Dévisagée par la haine, le dégoût, la jalousie et la peur, ta mère essaie te t'emmener plus loin, mais tu réussis tout de même à entendre ses propos. « Monstre ! Espèce de monstre ! Tu n'es pas ma soeur ! Tu ne l'as jamais été ! » La même torpeur, suivie de la même douleur. Toi qui croyait qu'elle s'était calmée depuis la dernière fois, dehors, tu réalises que tu t'es trompée à un tel point que cela en devient ridicule. Les larmes aux yeux, tu ne trouves que dire tandis que tes parents la grondent et finissent par la punir. Ce qu'ils ne peuvent pas voir, c'est ce dernier regard que Pétunia te lance. Un regard de ce qu'il y a de plus clair. Elle le pensait vraiment quand elle disait qu'elle n'avait plus de soeur. Le coeur brisé, tu te laisses aller dans les bras de ta mère qui tente en vain de te consoler.